La journée a été difficile au boulot, vous êtes épuisé.e. Vous foulez le pas de la porte et vous vous dirigez vers la cuisine pour vous verser un verre de vin, accompagné d’un petit bol de croustilles. Vous dégustez le tout assis.e sur le divan. Vous ressentez pleinement le réconfort recherché. Vous vous levez ensuite pour vous affairer à la préparation du souper.
D’après vous, s’agit-il d’un bon comportement ?
La nourriture peut-elle être une stratégie de réconfort ?
La réponse est oui. La nourriture peut être une stratégie pour réguler les petites variations de l’humeur. Manger change notre humeur, ne serait-ce que minimalement, et nous fait vivre des émotions, ce qui est parfaitement adapté et sain. L’humain est un être à la recherche de plaisir. Il le trouve très bien dans la nourriture puisque celle-ci a le pouvoir de stimuler les zones du plaisir et de la récompense dans le cerveau, en plus de procurer une petite dose d’énergie.
Qui plus est, sachez que seuls les aliments gras, sucrés ou salés – et transformés – ont le pouvoir d’apaiser les envies de manger émotionnelles (1). C’est pourquoi nous n’allons pas vers les brocolis ou les concombres lorsque nous sommes animé.e.s d’une petite émotion. Ça n’a donc rien à voir avec notre volonté ou notre discipline.
Ainsi, ces envies de manger émotionnelles sont parfaitement normales et saines. Il vaut mieux les écouter et les respecter. Alors, si vous décidez de manger pour réguler votre émotion, identifiez l’aliment dont vous avez envie, savourez-le, ressentez le réconfort et l’apaisement, puis passez à autre chose. C’est parfait !
Le problème survient quand la culpabilité se pointe le bout du nez
Malheureusement, nombreuses sont les personnes qui ne s’assument pas pleinement lorsqu’elles « mangent leurs émotions » et se sentent coupables. La culpabilité alimentaire est un fléau très présent dans notre société. Ce qu’il faut savoir, c’est que la culpabilité nuit au sentiment d’apaisement et de satisfaction. Reprenons notre exemple précédent.
La journée a été difficile au boulot, vous êtes épuisé.e. Vous foulez le pas de la porte et vous vous dirigez vers la cuisine pour vous verser un verre de vin, accompagné d’un petit bol de croustilles. En versant le vin, vous vous dites que vous ne devriez pas, que ce n’est pas raisonnable. Pour calmer la voix culpabilisante, vous optez plutôt pour quelques carottes déjà coupées, que vous déposez dans un bol. Vous choisissez quand même de boire votre vin, mais votre esprit n’est pas tranquille. Vous pensez aux croustilles qui vous faisaient envie et vous engloutissez votre vin rapidement, pour ne pas vous sentir trop coupable. Vous vous levez ensuite pour vous affairer à la préparation du souper, mais vous grignotez par ci, par là , ne vous sentant pas satisfait.e. Vous vous versez un autre verre de vin, en vous disant que celui-là devrait vous aider, ce qui n’arrive pas puisque vous le buvez avec encore un peu plus de culpabilité. Vous avez de la difficulté à vous arrêter de manger au souper parce qu’on dirait que vous n’êtes jamais pleinement satisfait.e de votre repas. En soirée, vous décidez finalement de vous offrir ces fameuses croustilles qui vous faisaient tant envie. Mais l’accumulation des émotions et l’absence d’apaisement et de satisfaction font que vous doublez votre quantité de croustilles.
Voilà une situation qui survient de façon régulière chez les personnes qui mangent avec un sentiment de culpabilité. Elles ne peuvent tout simplement pas ressentir le réconfort que la nourriture pourrait leur apporter. Ce faisant, l’envie de manger émotionnelle n’est jamais comblée et revient constamment. La personne pourra donc manger beaucoup et souvent dans l’espoir de ressentir ce réconfort, qui n’arrivera jamais.
Deux clés pour ressentir le réconfort
Dans un premier temps, vous allez travailler à diversifier vos stratégies de régulation des émotions. Les personnes qui ont une relation positive avec la nourriture ont généralement dans leur poche arrière une diversité de stratégies pour réguler leurs émotions. Ainsi, elles utilisent parfois la nourriture pour se réconforter et parfois d’autres stratégies. On peut penser à sortir marcher, parler avec un.e ami.e, écouter la télévision ou de la musique, se divertir… En fait, une bonne stratégie est une stratégie qui est efficace pour vous.
Ensuite, apprenez graduellement à chasser la culpabilité quand vous vous réconfortez avec la nourriture. Bien sûr, si vous avez tendance à vous sentir coupable en mangeant, vous aurez besoin de pratique et d’apprivoiser l’idée que l’on puisse manger ce dont on a envie, sans culpabilité. Mais on y arrive. Prenez le temps de choisir ce qui vous fait envie, le plus précisément possible. Dégustez l’aliment en vous concentrant sur le plaisir qu’il vous procure plutôt que sur la petite voix dans votre tête qui vous fait sentir coupable. Vivez pleinement le réconfort et l’apaisement que vous recherchez. Vous n’aurez ainsi pas besoin d’une grande quantité de nourriture pour ressentir le réconfort.
En utilisant ces deux clés, vous vous assurez de tirer tous les bénéfices du plaisir de manger et vous disposez d’un éventail de stratégies dans lequel piger, au besoin, pour les petites et les grandes variations d’humeur.
(1) Terme proposé par le Dr Jean-Philippe Zermati, nutritionniste, et l’équipe du Groupe de Recherche sur l’Obésité et le Surpoids.